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Les secrets de la pêche à pied
Des pêcheurs à pied de l'école de Picherel cherchant des coquillages.
La pêche à pied va connaître son apogée en Bretagne à l'occasion des grandes marées de coefficients d'amplitude supérieurs à 100 (dans une échelle de mesures de 20 à 120) entre le 31 août et le 2 septembre. Trois journées qui vont voir l'estran, cette partie du littoral découverte à marée basse, dévoiler plus largement qu'à l'accoutumée ses précieux trésors : amandes, bigorneaux, bulots, bernicles ou berniques, coques et couteaux, et encore les ormeaux et les crustacés, que seuls les bassiers (pêcheurs à pied) confirmés savent dénicher. Mais ceux-là, souvent, ne pêchent pas l'été pour n'être pas pris pour des touristes.
Les amateurs préparent leur matériel : les bottes, le sac de pêche, le haveneau (épuisette munie d'une barre frontale) que l'on pousse devant soi pour piéger les crevettes grises (boucauds) sur les fonds sablonneux ; le crochet à crabe au bout arrondi pour ne pas blesser le crustacé ; la gaffe à poisson destinée à traquer le congre et le homard dans leur trou, sans oublier le casse-croûte car l'exercice est parfois épuisant.La surveillance des sites de pêche à pied de loisirs est assurée dans chaque département littoral par les services du ministère de la santé, qui délimitent les zones autorisées en fonction de critères d'accessibilité et de sécurité, de foisonnement des espèces et d'absence de pollution (eaux vannes, plomb, cadmium, mercure). Cette surveillance, depuis 1996, est assortie d'une réglementation qui fixe pour chaque espèce les tailles minimales autorisées (tourteau : 5 cm dans la plus petite longueur et 14 cm dans la plus grande ; crevette grise : 3 cm de longueur totale), ainsi que les quantités : pas plus de 100 bulots calibrés, par jour et par personne, car il y va de la sauvegarde des espèces.
Considéré comme "imprescriptible et inaliénable", le droit de pêche à pied était à l'origine, comme le ramassage du bois mort ou la cueillette des truffes, un moyen de subsistance du "petit peuple des grèves", selon l'expression d'Alain Corbin, l'historien du sensible. L'ordonnance de Colbert de 1681 avait confirmé ce droit et fixé son étendue à "tout ce que la mer couvre et découvre pendant les nouvelles et pleines lunes et jusqu'où le plus grand flot de mars peut s'étendre sur les grèves" (cité par Gaëlle Geoffroy et Christian Papinot, auteurs d'une étude sur la consommation de la pêche à pied en Bretagne). De la pointe de l'Arcouest au sillon de Talbert s'étend un paradis, entre bancs de sable, rochers et galets, peuplé de praires, de palourdes et de couteaux. Seuls les bigorneaux signalent leur présence. Etrilles et crevettes se réfugient dans les petits lagons laissés par la mer. Chaque rocher peut cacher un tourteau, une araignée, et les jours de chance un homard ou un ormeau, coquillage très protégé. "Chaque pierre est un écosystème ; il faut éviter de les soulever, ou bien les remettre en place", confie l'architecte Patrick Chavannes, qui depuis des années arpente l'estran de l'Arcouest.
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